mercredi 30 octobre 2013

Un dimanche à Rodilhan...


Récit de Christophe Chay, journaliste…


photo midi libre
"Les yeux brûlent encore un peu... Les vapes de gaz lacrymo ont autant pollué l'air d'une petite commune ce dimanche que les sirènes de guerre rompant le silence dominical d'un village aspirant plus que tout à la paix. J'y ai croisé des ouailles, désorientées que la messe du dimanche matin soit avancée le samedi soir afin que la cérémonie ne soit pas perturbée... J'y ai croisé une mamy octogénaire, pétrie d'afición, qui m'a montré les blessures de son bras après avoir été bousculée dans des ronces par de "pacifistes manifestants non-violents"... J'y ai croisé des villageois sans histoire, apeurés par l'état de siège de leur village, confinés dans leurs maisons, certains plus âgés avec la peur au ventre, d'autres plus jeunes, pris à parti physiquement par de "pacifistes manifestants non-violents". Visage en larmes, la jeune cavalière, pétrie de fé di bioù, crie à l'injustice, se fait essuyer le visage tuméfié par des habitants sur le pas de leur foyer... Les sirènes redoublent alors que les spectateurs quittent les arènes aux côtés de leurs élus, avec la satisfaction de la réussite de leur journée. En passant sous le porche filtré, quatre jeunes du village, âgés de 8 à 13 ans interpellent une vieille dame : "eh madame ! Vous étiez à la corrida ? Vous aimez ça ?!", et la dame de répondre "oui bien sûr !", et les petits de rétorquer "vous avez bien raison ! Nous, on connaît pas, mais on veut bien y aller ! C'est les fous qui nous en donnent l'envie !". Esprit de contradiction quand tu nous tiens...
Un groupe d'aficionados prend un verre à la sortie des arènes pendant que quelques confrères journalistes découvrent avec stupéfaction que leur voiture a subi quelques modifications d'ordre pneumatique ou autre. Les CRS s'approchent des aficionados accoudés au comptoir du Restaurant des Arènes : "ne restez pas longtemps ici, nous allons bientôt partir". Le groupe quitte les lieux et s'entend dire par les gendarmes mobiles au niveau du deuxième barrage filtrant : "on vous déconseille de passer par là. Ils sont là-bas et vous attendent pour vous provoquer. Ca peut dégénérer..." Le périmètre de sécurité de 400 mètres a été allègrement profané, Rodolfo cherche encore une toise pour me le prouver. Ce dimanche, j'ai aussi croisé un père de famille, salement pris à partie par des "pacifistes manifestants non-violents" et dont les filles s'inquiétaient qu'il n'ait pas réussi à passer le barrage filtrant. Dans ce Berlin du XXIe siècle le Mur de la Honte n'est pas celui que l'on croit, et le rideau de fer est projeté à terre, aux pieds des CRS, obligés de faire reculer de "pacifistes manifestants non-violents", dont des armes ont été retrouvées dans un coffre de voiture. "Défendez-vous en ne disant rien et ne répondant à aucune provocation" nous disaient-ils... Très bien monsieur, mais alors pourquoi un avocat respectable a été pris à partie, s'est fait cracher dessus avant d'être peinturluré en rouge par de "pacifistes manifestants non-violents" ?
Autant de questions qui me turlupinent, tout comme ce Molière d'honneur, plus ridicule que précieuse, qui récompense la phrase la plus drôle de l'année, déclamée par Jempire : "Nous condamnons toute insulte et tout dérapage". Sûr que la remise de cette récompense va être retransmise en direct sur BoboFMTV. Selon les derniers comptages, Jempire aurait dépassé le cap des 8.000 citations des termes "tortionnaire", "assassin" et "barbare"... en une journée. Pas mal pour quelqu'un passé maître dans l'art de l'éructation. Des vapeurs émanent encore derrière ce lotissement, les "pacifistes manifestants non-violents" brûlent une affiche, alors que d'autres se jettent à terre pour empêcher les courageux qui osent faire face à la vindicte anti-spéciste. Un villageois à deux-roues s'arrête net et se fait molester par de "pacifistes manifestants non-violents", forçant les gendarmes à intervenir... On parle de procureur de la République derrière moi. Évoquerait-on enfin la possibilité d'une plainte par le parquet ? D'une dissolution définitive d'un groupuscule ayant fait régner la terreur aujourd'hui ? Nous sommes en 2013, dans un paisible village de France, la journée est enfin terminée, avec aussi son lot de joie et de succès. Toute ressemblance avec des personnes ou des situations existantes ou ayant existé ce dimanche à Rodilhan ne saurait être que purement réelle et bien ancrée dans la réalité."

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